Eléonore Laloux est trisomique. Mais elle est surtout une personne autonome et inspirante. Auteure de «Triso, et alors ! » (Max Milo, 2014), elle est, depuis les dernières élections, conseillère municipale de la ville d’Arras. Retour sur un parcours atypique et brillant.
Lorsqu’Éleonore est née, les médecins ont annoncé à son père qu’elle était porteuse
d’une « aberration chromosomique ». « Mes parents étaient sous le choc dès l’annonce ». On sépare Éléonore de sa mère, on donne à cette dernière un cachet pour stopper la montée de lait, sans lui demander son avis. On s’empare de leur vie, de leur destin.
« Un mois après ma naissance, mes parents sont allés dans une famille avec une fille qui avait la trisomie 21 pour avoir quelques conseils. Comment vivre avec un enfant ayant une trisomie 21 et que faire pour lui permettre de se développer au mieux ? « . Ils l’emmènent également voir plusieurs spécialistes : orthophonistes, pédiatres, orthopédistes, kinés, psychologues…
Mais les déboires médicaux ne font que commencer. Née avec une une malformation cardiaque, Eléonore est hospitalisée dans la banlieue sud de Paris à l’âge d’un an: « Juste après mon opération du cœur, j’ai attrapé une infection à staphylocoques. Les médecins ont demandé à mes parents si ils devaient continuer ou arrêter parce que j’étais entre la vie et la mort. J’étais dans une pièce stérile. Mes parents m’ont vue à travers une vitre. Je ne pouvais pas parler, je leur ai fait un sourire. Mes parents ont dit ’’on continue ».
Mes parents m’ont vue à travers une vitre. Je ne pouvais pas parler, je leur ai fait un sourire. Mes parents ont dit ’’on continue ».
De 2001 à 2006, elle poursuit son cursus au sein d’une Classe d’Intégration. Pour trouver un métier, Eléonore a effectué de nombreux stages dans des établissements dits « ouverts », et une formation par alternance.
« Aujourd’hui, je suis agent administratif à l’hôpital d’Arras. J’ai été employée en 2006 avec un contrat à durée déterminée. En 2008 j’ai obtenu un autre contrat à durée indéterminée. Je vais chercher le courrier. Je fais de la mise sous pli. J’envoie des factures à des caisses d’assurance maladie et des mutuelles. J’envoie des mails et je fais du classement alphabétique. Je vis seule dans mon appartement depuis août 2011. »
Un tournant dans son parcours
Mais Eléonore a d’autres talents qu’elle compte bien mettre au service de la communauté. En 2018, le candidat Frédéric Leturque lui propose de concrétiser son combat pour l’inclusion en intégrant sa liste pour les élections municipales. Deux ans plus tard, la trentenaire se retrouve donc conseillère municipale déléguée à la transition inclusive, une élection qui a changé son regard sur elle-même, mais aussi sur la société: « Depuis mon élection en tant que conseillère municipale, mon regard sur moi-même a changé. Je me sens plus autonome, plus raisonnable, plus sage, plus humble, plus belle, plus sympathique, plus souriante et plus dynamique. »
La confiance dont elle bénéficie en tant qu’élue permet à Eléonore de devenir de plus en plus responsable et apte à servir la population: « J’ai grandi dans ma tête. Je ne mélange pas le personnel et le professionnel. Je sais ce que je veux. Avant je ne pensais qu’a moi et maintenant je pense aux autres. Je suis fière de moi et je crois que je donne une belle image de moi. »
« Il faut casser les préjugés. Les personnes en situation de handicap sont capables d’être autonomes, de prendre des décisions et de faire plein de choses. Elles sont avant tout des citoyens à part entière. »